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Doliprane : la fièvre monte

  • Nathalie Perrin-Gilbert
  • 16 oct. 2024
  • 2 min de lecture

Dernière mise à jour : 20 juin

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En même temps qu’elles ont lancé un appel à une grève générale, les organisations syndicales représentant les personnels de Sanofi organisent un rassemblement ce jeudi après-midi à Compiègne (Oise) sur l’un des deux sites de production du Doliprane, ce médicament parmi les plus vendus en France.

La raison de la mobilisation est bien connue depuis quelques jours car les médias comme les politiques (parlementaires, élus locaux, responsables de partis) se sont emparés du sujet : après l’avoir murmuré il y a un an, Sanofi passe aujourd’hui à l’acte et annonce publiquement son intention de céder Opella au fonds d’investissement américain CD&R.


Entité de santé grand public de Sanofi, Opella produit en France et commercialise le Doliprane, mais aussi les Lisopaïne, Dulcolax et autre Mallox, médicaments bien connus. Avec un chiffre d’affaires de 5,2 milliards d’euros en 2023, elle emploie en France 1.700 salariés désormais inquiets pour leur avenir. La question posée est de savoir si le gouvernement doit – et peut légitimement – s’opposer à la décision prise par le géant pharmaceutique français de vendre Opella à des investisseurs étrangers.

La réponse est oui.


Oui, parce que Sanofi a bénéficié d’aides financières publiques de plusieurs milliards d’euros durant ces dix dernières années (près de 10 milliards vraisemblablement) notamment pour le développement de son secteur R&D. Oui, parce qu’au-delà de ces aides directes, le géant Sanofi a su également profiter de très nombreux avantages fiscaux et crédits d’impôts, comme l’avait révélé dès 2013 le journal l’Humanité. Le gouvernement doit défendre, au regard de ces aides, la nécessité de sécuriser l’approvisionnement de nos concitoyens en médicaments et de maintenir les emplois sur les sites de production français. En d’autres termes, il doit défendre la souveraineté sanitaire française promise par le Président de la République au sortir de la crise Covid.


Oui enfin, parce qu’il est temps d’avancer dans le débat sur les biens de santé, et notamment sur les médicaments : sont-ils des biens privés ou des biens communs ? Certes, ils sont produits et commercialisés par des groupes privés ; certes, ils nécessitent en amont des investissements lourds (mais, on l’a vu, largement soutenus par la puissance publique) ; les médicaments n’en sont pas moins indispensables à la communauté humaine pour répondre à l’un de ses besoins essentiels : la santé.


Sortir de la contradiction entre la santé (en tant que droit humain fondamental et universel) et une industrie privée du médicament (ultra-concurrentielle et lucrative pour ses actionnaires) suppose l’arbitrage du politique. Certains domaines de notre existence doivent échapper à l’extension sans limite de la privatisation.

Tel est l’enjeu, à mon sens, du débat sur les Communs.


Lyon, le 17 octobre 2024

Nathalie Perrin-Gilbert

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